1962-1965
« Mes travaux de glaciologue se poursuivent en campagnes d'été dans la zone côtière de Terre Adélie, près de la base Dumont d'Urville. Je dirige le 15ème hivernage français en Terre Adélie, une tâche pas toujours aisée mais enrichissant mon expérience polaire. Manchots Adélie et Empereurs sont les voisins amicaux d'une communauté isolée pendant près d’un an pour assurer la marche d'un observatoire en Antarctique. »
Américains, Russes, Danois… s’équipaient alors en matériel de forage, un domaine technique en pleine évolution. De notre côté nous avons mis au point un équipement en réalisant des carottages dans la glace côtière de Terre Adélie ou j’hivernais en 1965 comme « chef de District ». Des tests jusqu’à 200 m nous ont permis de trouver de la vieille glace venant de l’intérieur de l’inlandsis, datant du dernier âge glaciaire il y a 20.000 ans. Les analyses des isotopes seront difficiles à interpréter en termes de climat : les variations de température ainsi obtenues ajoutaient celles du climat à celles liées à l’altitude du site d’où provenait la glace.
Notre équipe de glaciologues est venue rechercher sur le terrain un tel site pendant les campagnes d'été 1961-62 et 1963-64. Equipés de piolets et de crampons nous avons planté des repères pour mesurer les déplacements, fait de multiples trous pour prélever des échantillons analysés ensuite en métropole.
Les résultats sont clairs : cette glace bouge peu (quelques mètres par an), elle vient de loin (ayant parcouru de 600 à 800 kilomètres), et elle a peut-être 20.000 ans d'âge au voisinage de la moraine formée de poussières et de cailloux que le glacier remontant du fond a arraché au socle rocheux. C'est sur ces résultats que j'ai soutenu ma thèse.
Comme toujours, le chercheur veut en savoir plus ; et pour cela, nous devions carotter cette glace, de la surface au fond. Nous ferons quelques essais dans les glaciers des Alpes et après quelques modifications la foreuse utilisée habituellement dans les sols paraît être capable de nous fournir des carottes sur une centaine de mètres de profondeur dans la glace. C'est proche de l’épaisseur que donnent, dans cette zone toute proche de la côte, les mesures gravimétriques réalisées depuis la surface.
Notre projet accepté et financé, nous ferons là deux campagnes de forage au cours des étés encadrant l'année 1965. Elles ont donné de bons résultats ......Mais les chercheurs, comme les humains en veulent toujours plus. Et ce que nous voulions, c’était un forage profond à l’intérieur du continent sur un site où la glace est épaisse et bouge peu.